Historique

Il était une fois…
Orginal en PDF

Un bourg en Haute-Saône qui portait un bien étrange nom ! Et ainsi la fable pourrait débuter afin que notre imagination tisse l’histoire qui lui sied. Notre esprit aime à débuter ainsi cette rubrique sur le passé de notre commune car bien souvent, lorsque l’on se trouve dans un endroit, on se questionne quant à ce qui l’a construit au fil des siècles et au sens du nom qui le qualifie.
La tâche étant importante au regard des événements historiques, et notre expertise étant limitée, vous présenter notre propos en deux volets semble judicieux.
Le premier s’attache à l’organisation géographique au fil des siècles, le deuxième à l’histoire dans l’Histoire avec deux événements majeurs : la charte d’affranchissement en 1429 et la disparition de la maison d’Oiselay en 1654.

Trois sites…

Ainsi, notre village est constitué de trois lieux : Oiselay, le Hameau de Grachaux et la ferme des Chaussenots. Enquêtons autour de l’origine de ces appellations. Le bourg principal se nommait Oselar, Oseler, Oiseler, Montoiseler, Oisellart, Mont Oiselier, Oyselet, c’est-à-dire le mont favorable aux oiseaux. Avez-vous remarqué aux alentours la diversité des volatiles dont les chants nous livrent une bien belle ôde à la vie ? Roland Schmitt aimait à nous rappeler que Grachaux signifie les « gras champs ».
Il est vrai que la terre colle aux bottes et les cailloux qu’y s’y entremêlent ne nous facilitent pas la besogne. Ce qui, d’ailleurs, a très certainement été d’intérêt pour le mortier des chaumières. Nous trouvons aussi que le mot « gras » en patois a pour sens « chaud » : « il ne fait pas gras (chaud) dehors, la neige ne va pas tarder à venir ». Il faut bien reconnaitre que Grachaux est exposé à la bise du Nord alors que Oiselay aime à se réfugier entre les monts de Gy. Quant à la ferme des chaussenots, notre enquête piétine pour remonter jusqu’à son origine. Avec l’aide précieuse de Messieurs Paul Rampant et Pierre Pégard, nous pouvons néanmoins vous livrer quelques pistes. Le lieu existait bien avant 1940… Depuis il y eut M. Lime, étaloniste (conducteur de juments),
puis la famille Fluckiger (des Suisses) dorénavant installés à la ferme du Moulin à Montarlot-Les-Rioz et ensuite Alfred Rampant, le père de Paul.

Pour expliquer la configuration géographique, remontons une novuelle fois le temps. L’époque exacte de l’installation des premiers occupants nous échappe.

Néanmoins, il est certain que plusieurs habitations sont présentes à l’époque romaine1 puisqu’une station s’y trouve du fait des « deux voies Besançon-Langres et Bourbonne Besançon qui tracent en la Séquanie2. » Les lieux des Chaussenots et de Grachaux remontent peut-être aussi au Moyen-Âge, l’important étant que du personnel soit sur place pour cultiver les terres, et les surveiller. On trouve l’indispensable matière première : les bois à proximité fournissent le nécessaire pour les demeures, le chauffage ; quant à l’eau, elle ne manque point puisque deux sources existent dans la plaine de Grachaux et la source des Douins a un débit qui permet de construire un moulin pour la production de farine à gaudes et d’huile de noix. Les ruines vers la ferme
des Chaussenots sont encore visibles.

Des traces plus précises de notre histoire ont été révélées par A-J. et F. Borrey avec « Une maison franc-comtoise du XIIIe au XVIIe siècle » : de 1200 jusqu’en 1654, où il est question des Sires d’Oiselay et de leur fief. Nous ne saurions détailler les quatre siècles de cette maison… attachons-nous surtout à pointer les événements qui ont impacté la vie des habitants.

Le territoire – le fief devrions-nous dire ! – appartient au sire Étienne de Chalon3 qui refuse de se soumettre aux différents palatins de Bourgogne. Pour se faire, il fait construire un château « très fort, très vaste, et dont le donjon domine à vingt lieues à la ronde. » Il faut dire que l’homme est un grand batailleur, en témoigne son sceau : à cheval, en tenue de combat. Les rivalités, haines familiales induisent les pires exactions et la ruine, la dévastation pour les paysans. Puis le comte de Chalon s’avoue vaincu au terme de vingt années d’échanges houleux, et signe un traité de paix le 16 juin 1227, « faisant hommage » de Oiselay et Rochefort à son rival. Et en 1237, il fait donation à son fils naturel Étienne (nommé Étienne 1er, 1237-1270) de Oiselay et de ses dépendances ainsi que d’autres fiefs (…) : ainsi nait la maison d’Oiselay où Oiselay est le chef-lieu de la seigneurie. Et sous Étienne III (1324-1335), le roc d’Oiselay est renforcé, le terme de « grande seigneurie » étant avancé, devant représenter avantageusement celle-ci ! « Le renom des hauts et puissants seigneurs qui l’habitent » invite un nombre croissant de gens à s’y installer, et ce d’autant plus qu’ils reçoivent des terres qui leur permettent d’élever leur famille, en comptant aussi avec des redevances bien moindre que dans d’autres fiefs.

http://www.sigilla.org/fr/sgdb/sceau-type/2879

 

Armorial de Franche-Comté par Jules et Léon Gauthier – Lien page 17  et 18

Le blason
227 – Oiselay – 1237-1650 : de gueules à la bande vivrée d’or. Timb. et cour. d’or sarh. D’un cygne volant d’argent. Sup : deux sauvages portant des massues. La devise : « Non inferiora secutus » – Qui ne suit pas les choses inférieures (Énéide, VI, 170) de Virgile, Le cri « Oyselet devant ! » XIIIe – XIVe s.

La devise : « Non inferiora secutus » – Qui ne suit pas les choses inférieures (Énéide,VI, 170) de Virgile,
Le cri « Oyselet devant ! » XIIIe – XIVe s

Au niveau topographique, nous avons trois lieux d’importance : le château ceint sur la partie culminante de la colline nommé aussi « bourg-dessus » ou « le Chastel4 », les habitants d’Oisellart étant aussi dits de « la Grande Montagne », et deux villages distincts au pied : le « bourg dessoubz le chastel » ou simplement le « bourg fert de murs » (le Bourg) par opposition au château et la « Ville d’Oisellart » (ville d’Oiselay) constitué de maisons construites autour de l’église. Comme c’est sous Étienne III que les villages et hameaux se développent rapidement, peut-être pouvons-nous envisager la naissance du hameau de Grachaux et de la ferme des Chaussenots à cette époque. En 1350, Jean 1er fonde dans le manoir d’Oiselay, une chapelle et une chapelenie dont le chapelain habite le château en mémoire de son défunt fils, héritier, qui meurt à vingt ans. Puis lors de la succession d’Étienne IV (1368-1402), on peut lire qu’il hérite « du château, bourg, ville et donjon d’Oiselay » – entre autres.

Origine bien antérieure !

Regardons plus en arrière, bien avant les sires d’Oiselay, pour comprendre d’où viennent le Duché de Bourgogne et le Comté de Bourgogne. Suivez le guide ! À Fouvent-le-Bas, en 1989, est avéré la présence d’homo sapiens et d’hommes Néandertal5 avec la présence d’outils utilisés pour se nourrir, comme des silex ou encore des « percuteurs durs », pour les tailler. C’est dire si « nous » occupons le terrain depuis des lustres ! De la préhistoire, notons les périodes où les populations ont migré, impactant de fait notre patrimoine linguistique, culturel… : celles d’Anatolie vers 5000 av. JC, d’autres d’Europe centrale vers 2000 av. JC. Puis au VIe siècle av. JC, la Gaule celtique pointe son nez après l’invasion des Celtes que les Romains nomment Gaulois. Sous domination romaine du IIe au Ie siècles av. JC, la Bourgogne (Duché et Comté) tient son nom des Burgondes qui arrivent autour de 470, jouant un rôle militaire au sein de l’Empire romain puis s’expansant afin de créer leur propre royaume. C’est ensuite le peuple germanique des francs qui investit le territoire, s’étendant de 481 à 843 à presque tout le pays.

 

En 843, les petits-fils de Charlemagne, mort en 814, morcèle en trois le territoire.

 

« Les limites bougeront par la suite, mais la séparation marquée par la Saône entre la Bourgogne franque (le futur duché, actuelle région Bourgogne) et celle qui relève du Saint Empire (la future Comté de Bourgogne, ou Franche-Comté) date de ce partage. »6 La Bourgogne franque qui sera rattachée au XIVe à la couronne de France, est gérée par un Duc dont le premier, au Xe siècle, est Richard le Justicier. Quant à la Franche-Comté, elle fait partie au IXe siècle de l’Empire, le royaume de Bourgogne-Provence appelé aussi royaume d’Arles, qui s’est construit sur les décombres de la Lotharingie.

C’est ainsi que la boucle historique est bouclée, nous rendant ainsi aux portes des sires d’Oiselay… et nous aidant à mieux appréhender les entités territoriales et administratives que sont le Duché de Bourgogne et le Comté de Bourgogne qui n’auront de cesse de se désaimer, de batailler. N’omettons pas également l’importance de l’abbaye cistercienne de la Charité, fondée en 1133, où ont été enterrés les seigneurs d’Oiselay

Article réalisé par la commission communication.


1 : La gaule romaine : la période va de la conquête de la Gaule par Jules César (-52) à la bataille de Soissons (486) qui marque l’avènement de la dynastie mérovingienne. wikipedia

2 : Le Séquanie, également appelée Séquanaise, est un territoire qui était contrôlé par le peuple gaulois des Séquanes. Il s’étendait entre la Saône, le Jura, les Vosges. Ce territoire correspond à l’actuelle région française Franche-Comté.

3 : Étienne II d’Auxonne, aussi appelé Étienne III de Bourgogne-Comté (1172-1241), parfois mentionné dans la littérature simplement par Etienne II. De la branche cadette de Bourgogne. Lire plus ici.

4 : Le « el » se transforme ensuite en « eau » donnant de fait « château ».

5 : Serait apparu voici 300 000 ans, il a disparu voici environ 30 000 ans avant notre ère.

6 https://lelephant-larevue.fr/ article d’Étienne Augris, paru en avril 2016 – n° 14


L’histoire dans l’Histoire…
Les Sires Doizelet

original en PDF

Expansion et décadence pourraient être les mots qui caractérisent les années à venir. Enquêtons… Au XIVe siècle, les lieux connaissent les foudres de la guerre que livre le duc de Bourgogne, souverain du Comté, aux barons Comtois en vue de réduire leurs privilèges. « L’un achève de ruiner la montagne, pendant qu’un autre porte ses coups dans la plaine. » Puis les bourgeois de Gray ravagent les fiefs d’Oiselay et mènent un siège devant le bourg. Les paysans en subissent les ravages…

Au début du XVe siècle, la Maison d’Oiselay est riche et puissante et elle l’expose lors de fêtes et solennités. Jean II (1402-1442) s’efforce, via des alliances, à consolider sa position. Pour les serfs, l’événement marquant est la signature en 1429 – le 18 novembre pour être précis – de la charte d’affranchissement. Ainsi, ce précieux document affranchit les gens de « la Ville », mainmortables, c’est-à-dire ceux qui ne possèdent rien et n’ont même pas la libre disposition d’eux-mêmes. Contrairement à ceux du Bourg qui étaient de franche condition en achetant chaque année leur liberté bien avant ! Disposition toutefois bien tardive puisque Gy, pour exemple, était affranchie depuis 1347. Leur liberté acquise, les habitants émigrent en masse vers les villages avoisinants, las des guerres que les seigneurs Doizelet entretiennent. Et de fait, la « Ville » est réduite à quelques habitants. Mais ne croyons point que Jean II se préoccupe soudainement du bien-être de ses gens en les affranchissant : « Il n’en avait cure ! » Seul le profit intéresse les seigneurs, en témoigne cette phrase dans l’acte « Pour nostre très grant et évidant proffit… » Ainsi, vaut-il mieux des serfs affranchis que point de serfs du tout ! De fait, font leur apparition les impôts fixes avec les quarante écus d’or vieux à payer à la saint Nicolas par l’ensemble des habitants, l’obligation de pourvoir à « l’aide aux quatre cas » et les tribunaux où siègent des notables nommés par le seigneur : le châtelain, le bailli et le prévôt. Le sire Doizelet reste le haut justicier et en tant que tel, il fait dresser des fourches patibulaires appelées aussi « Justices » où l’on pend les condamnés à la peine capitale (certainement le lieu-dit « aux Fourches »). Le tribunal se tient sur la place publique vers l’église ou aux Halles, construction seigneuriale sise à l’emplacement de la place des Halles et de la rue des Halles. En ce lieu s’organisent aussi les marchés le jeudi ; certaines particularités peuvent d’ailleurs nous choquer. En effet, l’emplacement est gratuit, néanmoins les représentants du seigneur prélèvent « une coupe par penal » des graines, le seigneur vend ses produits avant ceux des paysans et la vente ne débute que lorsque la cloche retentit sur ordre, sous peine d’une amende de soixante sols (soulz). Quant à la vente du bétail, elle s’organise en deux foires annuelles – le 23 avril et le 30 août – et les droits sont constitués de la langue des « grosses têtes » abattues. Ces impôts ne sont bien évidemment pas les seuls ! Néanmoins la situation des paysans s’en trouve améliorée et le fait d’avoir le droit de se marier avec qui bon leur semble, de rédiger un testament, et de choisir librement leur profession et leur lieu de résidence, leur fait certainement oublier les difficultés financières qu’ils doivent affronter.

Autre événement majeur pour l’avenir des habitants lorsque s’éteint la Maison Doizelet en 1654… Pour nous, villageois du XXIe siècle, qu’est ce qui est d’intérêt de 1429 à cette date ? La liberté acquise tout d’abord ! Ainsi, libres de se constituer un patrimoine, et surtout d’organiser leur vie comme ils l’entendent, les paysans reviennent progressivement sur les terres Doizelet, haussant le bourg parmi les plus peuplés du coin. Or, sous Antoine (1442-1472), très endetté, le comté est administré par son débiteur, Guillaume de Chalon qui y appose « les panonceaux d’Orange aux lieux et place de ceux Doizelet ». Certainement pas du goût des Comtois ! Puis, sans successeur mâle, la branche aînée des sires Doizelet s’éteint. Néanmoins, le domaine reste dans la famille puisqu’avant de décéder, Antoine marie l’une de ses deux filles, Jeanne, au fils aîné, Jean, de son cousin Charles Doizelet, sire de la Chassaigne marié à Jeanne de Chigny. Ce nouveau propriétaire, dit Jean III (1472-1503), lettré et poète, et remarqué pour ses brillantes qualités, est nommé en 1460 chambellan du duc Charles de Bourgogne. Ce dernier, se rappelant les services rendus lors des guerres par sa famille, lui autorise aussi certaines prérogatives sur son domaine Doizelet et lui rend même ce qui avait été retiré à son beau-père et alloué à Guillaume de Chalon. Malheureusement la lutte entre Louis XI et Charles le Hardi, plus connu par son surnom le Téméraire, met « la Comté à feu et à sang ». Pendant quinze ans, Allemands, Suisses et Bourguignons vident leurs querelles, armes en main, sur notre sol. Et en 1479, le château est bombardé puis brûlé. La paix revenue, Jean III relève l’ouvrage et à sa mort, en 1498, c’est son premier fils, Guillaume, dit Guillaume II, (1503-1528), qui hérite de la seigneurie Doizelet. Il n’a de cesse de demeurer sur ses terres pour les gérer et les faire croître, par héritages ou successions.

Claude 1er, fils aîné de Guillaume II, en fait de même pendant trente-neuf ans car seules comptent sa seigneurie et la Comté. Son fils Jean, dit Jean IV, quant à lui, préfère courir l’Europe et les combats durant les vingt-deux années de sa seigneurie – de 1567-1589. Le fils, Ermanfroy-François 1er, formé par son père et son oncle, Antoine de la Villeneuve, en fait de même pendant six ans (1589-1595) – en Savoie, en Comté – acquérant même le brevet de gentilhomme ordinaire de la chambre du duc de Savoie. Puis il reste sur ses terres, jusqu’en 1646, s’occupant de celles-ci, de sa famille et de la Comté. Nommé officiellement chevalier d’honneur à la cour de Dole le 15 décembre 1603 puis Intendant aux Affaires d’État le 15 octobre 1615, il s’emploie sur demande du Parlement à délimiter le Comté de Montbéliard et à contenir et surveiller les troupes du duc de Nemours vers Saint-Claude. Pendant les dix années qui suivent durant lesquelles la situation politique se dégrade, en son château, le baron Doizelley accueille tous ceux qui veulent s’y réfugier. Les villages alentours sont pillés. Le château, imprenable, résiste mais les deux tiers de la population sont décimés par la peste et la famine. Le vieux baron ayant perdu ses trois fils sur d’autres fronts, c’est son petit-fils du même prénom qui lui succède et signe la fin de la maison Doizelet, faute d’héritier.

Et le château Doizelet ? Sa position haute le rend imprenable en 1637 alors que les soldats français aux ordres de Richelieu veulent en déloger ceux qui s’y sont réfugiés. De plus, les remparts sont réparés et renforcés et des « lames de fer » couvrent les murailles ; la garnison du château, augmentée des soldats des châteaux avoisinants qui ont capitulé « s’oblige par serment à mourir, pour la défense Doizelley ». Même le duc Bernard de Saxe-Weymar, à la pratique de guerre sauvage, doit passer son chemin… La guerre de dix ans – jusqu’en 1644 – ne suffit point à faire disparaitre la forteresse moyenâgeuse. C’est en 1674 que « l’antique et fier château féodal » est ruiné, totalement détruit, sur ordre de Louis XIV qui veut que toutes les places fortes de la province disparaissent.

Que devient le patrimoine des sires Doizelet ? Caroline de la Baume étant l’unique héritière de son fils, à sa mort, l’ensemble du patrimoine revient à son neveu le comte de Saint-Amour. Celui-ci a aussi reçu de son père la riche succession des Granvelle (1686) en laquelle avait été versée la succession de la branche cadette Doizelley-Villeneuve (1637). Rapprochement des deux branches Doizelet alors que les hommes n’y sont plus !

Où sont les femmes ? Lorsqu’on consulte les ouvrages historiques sur le Moyen-Âge, et le livre de A-J et F. Borrey « Les Sires d’Oiselay », il est surtout question des hommes qui construisent les places fortes, les gèrent, guerroient… En notre esprit tourbillonnent parfois certaines figures féminines d’exception, telles Jeanne d’Arc (1412-1431), Jeanne Hachette (1454- ?), la guerrière qui a combattu Charles le Téméraire en 1472 à Beauvais, ou Jeanne de Belleville, dite « la Tigresse bretonne », (1300-1359), noble poitevine et bretonne devenue corsaire pour venger la mort de son époux. À Oiselay aussi ! Les femmes ont géré le domaine en l’absence des hommes, et lorsqu’elles deviennent tutrices des enfants. Des femmes de caractère et de cœur… dont Jeanne, épouse de Jean III. Sur les remparts, auprès de son époux lors de l’assaut final en août 1479, elle n’hésite pas à le protéger alors atterré par une flèche, et tue dix autres ennemis. À la mort de celui-ci, elle gère le domaine jusqu’à ce que Guillaume, le fils aîné, soit en âge de le faire. Et en fait de même pour ses trois petits-enfants au décès de Guillaume II. En l’honneur de ce fils, elle crée aussi une fondation dans la chapelle d’Oiselay afin que son âme repose en paix et que soient données des messes. Vaillante et énergique malgré ses trente ans de veuvage et les nombreux deuils qui ont jalonné son existence, elle s’éteint à plus de quatre-vingts ans.

Une histoire en rebondissements qui côtoie ce que l’on nomme la grande Histoire ! Née au XIIIe siècle d’un « bâtard de Bourgogne », la Maison des sires Doizelet a duré quatre siècles. Les serfs « peinaient tout le long de l’an » et peu d’archives en racontent l’histoire. Ils n’existent que par la terre qui est propriété des sires. Ainsi jusqu’en 1429, ils n’ont pas d’histoire et entrevoir la vie des sires Doizelet nous ouvre le livre de la leur, en partie. Leur accession à la vie citoyenne ne se fit que lentement ; de « vils manants » ils deviennent « Messieurs les habitants » dans la lettre d’Ermanfroy-François 1er qui en appelle à leur hardiesse pour défendre le château et la vie de tous ceux qui s’y sont réfugiés. Ces manants moins malheureux aux XVe et XVIe siècles, deviennent également libres d’esprit au XVIIe car l’ancienne autorité du
seigneur « farouche, intransigeante, capricieuse » devient « bonhomme, fondée et bon enfant ».
Vivre le présent est essentiel, néanmoins ouvrir une fenêtre sur notre histoire passée permet de nous grandir. Au fait de la hardiesse de ceux qui nous ont précédé, des sires aussi qui ont défendu la Comté et mené nos couleurs jusqu’à Jérusalem, nous pouvons être fiers d’appartenir à la Comté franche.

Nous voici rendus à la fin du XVIIe siècle… Que nous réserve le gardien du temps pour la suite ? Nous le découvrirons dans un prochain volet !


Notons que certaines familles portent aujourd’hui le nom de : « Oiselay », « Oizelet » et « Doizelet » telle la romancière et traductrice Sylvie Doizelet, née à Lyon.

Article réalisé par la commission communication.